La RDC reprend en main son cobalt artisanal

La RDC reprend en main son cobalt artisanal

Créée en 2019, l’Entreprise générale du cobalt a été lancée hier officiellement en RDC. Cette filiale de la Gécamines, l’entreprise publique minière congolaise, vise à assainir la filière et à structurer le marché du cobalt artisanal dans ce pays premier producteur mondial de ce minerai indispensable à la fabrication des batteries rechargeables. Un défi et un immense chantier en perspective.

Six mois, c’est le délai que se donne à compter d’aujourd’hui la nouvelle filiale de la Gécamines pour asseoir son monopole sur l’achat, le traitement, la transformation, la vente et l’exportation du cobalt artisanal. Rien de moins. Pour mener à bien sa mission, l’Entreprise générale du cobalt aura comme partenaire financier et commercial Trafigura, la compagnie de négoce international.

L’objectif affiché est multiple : récupérer un marché qui échappe à l’État et qui est évalué à 20 % de tout le cobalt produit en RDC, le pays étant le leader mondial, avec l’année dernière 67 % de la production mondiale. Ce cobalt produit illégalement est exploité « par un système mafieux » selon les mots du patron de la Gécamines. Il représente un manque à gagner pour l’État d’environ un milliard de dollars selon Albert Yuma et son mode d’exploitation nuit surtout à l’image du pays à l’international. Gaetan Lefebvre analyste au BRGM -Bureau de recherche géologique et minière- confirme, l’enjeu sociétal est bien réel, « la situation des travailleurs illégaux est devenue problématique pour l’image du pays », explique-t-il.

Maîtriser la filière à la manière de l’Opep

La RDC affiche aujourd’hui avec conviction sa volonté d’améliorer les conditions de vie des mineurs artisanaux et de produire un cobalt responsable, en assurant une traçabilité maximale. Sachant que la demande devrait doubler d’ici 2030, le pays veut se positionner à l’international et être celui qui impose le prix du marché. Comme le fait l’Opep pour le pétrole, la RDC se verrait bien en leader d’une Opep du cobalt, avec là encore un objectif : éviter que le cobalt artisanal acheté à bas prix n’inonde le marché et fasse chuter les prix comme cela a été le cas en 2018.

Le cobalt est un minerai porteur, il vaut actuellement deux fois plus que le nickel. Transformer le minerai artisanal en RDC rapporterait au pays d’autant plus qu’une fois sous forme d’hydroxyde de cobalt, le produit vaut trois plus. « L’enjeu pour la RDC est d’éviter que la valeur ajoutée des batteries parte en Chine où est aujourd’hui transformée la quasi-totalité du cobalt », explique Gaëtan Lefebvre.

Des objectifs jugés irréalistes

Mais les bonnes intentions suffiront-elles ? Jean-Pierre Okenda en doute au regard de l’énormité des défis, même s’il qualifie l’ambition de louable. Pour le directeur des Industries extractives de l’ONG Ressource Matters « tant que la gouvernance et la gestion du secteur restent les mêmes, il n’y aura pas de progrès significatifs ».

Il craint que ces nouvelles ressources servent surtout à combler les dettes de la Gecamines plutôt qu’à renflouer les caisses de l’État et à améliorer le quotidien des mineurs. Quant au délai de six mois fixé pour que ce monopole de l’État soit effectif, il le juge « irréaliste, d’autant que, rappelle-t-il, aucune annonce n’a été faite sur le nombre de Zones d’exploitation artisanales concernées ni sur leur emplacement précis. »

Extraction de cobalt dans une mine de RDC Michael Robinson Chavez/The Washington Post via Getty Images

Source : https://www.rfi.fr/

Abonnez-vous aux mises à jour

Adresse e-mail non valide
Avec nous, pas de courrier indésirable. Vous pouvez vous désinscrire quand vous le souhaitez.